Au festival Omnivore, la “jeune cuisine” s’émancipe et prend racine

Au festival Omnivore, la “jeune cuisine” s’émancipe et prend racine

Image :

© Romain Guillet

photo de profil

Par Robin Panfili

Publié le

On est allés prendre le pouls de ce mouvement gastronomique en pleine ébullition.

© Romain Guillet

À voir aussi sur Konbini

En quelques années, le festival culinaire Omnivore s’est mué en rendez-vous incontournable. Demandez aux chefs, au public qui fait le déplacement, aux journalistes qui sprintent entre les différentes scènes, peu vous diront le contraire. Sur la scène culinaire, le festival est parvenu à se faire une place de choix au cœur de l’écosystème – salons, prix, guides et classements gastronomiques. Pour cette 14e édition, si le mot d’ordre était toujours de mettre en avant la “jeune cuisine”, c’était surtout l’occasion de montrer que celle-ci “s’enracine”, selon les propres mots de Luc Dubanchet, le fondateur et directeur d’Omnivore.

Prise de conscience environnementale, repenser l’agriculture et notre façon de consommer… S’il n’y a rien d’inédit tant le sujet est présent et défendu ces derniers mois, le ton est donné. “Comprendre et respecter les racines, pour mieux bâtir l’avenir”, voilà la mission confiée aux 130 chefs, artisans, paysans, vignerons ou sommeliers invités à secouer la Maison de la Mutualité.

© Romain Guillet

© Caspar Miskin

Comme chaque année, c’est devant la grande scène que le public en a (le plus) pris plein la vue. On pense à l’étonnante performance d’Alexandre Mazzia qui, à l’image de sa mise en scène (ses cuisiniers étaient tous habillés en tenue de bloc opératoire), nous a offert une nouvelle porte d’entrée vers la complexité de sa philosophie culinaire.

Bloc opératoire et viande de phoque

On pense aussi à l’hommage vibrant et très peu dissimulé de Joris Bijdendijk (Rijks) au patrimoine gastronomique des Pays-Bas, à la prestation de haute voltige de Manon Fleury (Le Mermoz), ou à la masterclass remarquée du chef montréalais Simon Mathis (Manitoba) qui avait pris le soin de ramener dans ses valises, en douce, de la viande de phoque.

© Romain Guillet

Si, historiquement, Omnivore a les pieds bien plantés dans la mythique Maison de la Mutualité, la laborieuse architecture du lieu laisse parfois rêver à une délocalisation des festivités dans un espace mieux adapté à la déambulation et à la circulation entre les différentes scènes. Car, sur ces scènes-là, le pari était aussi réussi. Et pour cause, la programmation semble être parvenue à répondre aux envies d’un public éclectique – des particuliers aux professionnels, en passant par les élèves en écoles de cuisine.

Comme une salle de cinéma

Comme un clin d’œil au phénomène de “producteurs stars” que nous abordions il y a peu, la scène dédiée aux artisans, autrefois marginale – ou tout du moins plus discrète – a fait salle comble à toutes les conférences où nous avons eu l’occasion de nous rendre – y compris à celle de Lionel Durot, artisan fumeur, dont les fumées ont un moment laissé craindre une évacuation des lieux.

La pâtisserie et ses représentants du jour (Claire Damon, Nina Métayer, Pierre Marcolini, Sébastien Bouillet…) n’ont pas été en reste. Comme on l’observe depuis quelques années déjà, le sucré s’est enfin octroyé la place et le rang qu’il mérite et s’est vu intégré directement à la programmation du festival, plutôt que d’être relégué à une scène dédiée : tout un symbole.

Signe de la maturité de l’événement, les têtes d’affiche (Jean-François Piège, Christophe Pelé, Christophe Saintagne, Giovanni Passerini, Florent Ladeyn…) se sont prêtées au jeu des scènes plus confidentielles, dans l’ombre de leur grande et impressionnante grande sœur à laquelle ces derniers ont été habitués. Et comme chaque année, à la sortie de la Mutu, on ne s’étonne plus de voir le public déambuler comme s’il sortait d’une salle de cinéma, commentant les pirouettes de chefs comme l’on débattrait d’une fin de film. En se confirmant de la sorte, cela ne fait plus de doute, Omnivore a grandi.

Quant au palmarès 2019, voici les lauréat·e·s :

  • Créatrice de l’année : Adeline Grattard (Yam’Tcha, Paris 1er)
  • Le Pâtissier : Rémy Havetz (Sapnà, Lyon)
  • La Révélation : Thijs Meliefste (restaurant Meliefste, Pays-Bas)
  • L’Ouverture : Guillaume Sanchez (NE/SO, Paris 9e)
  • La Jeunesse : Manon Fleury (Le Mermoz, Paris 8e)
  • Le Repaire : Café du Coin (Paris 9e) ; ex aequo avec Le Petit Hôtel du Grand Large (Quiberon)
  • Les Rebelles : Tabata et Ludovic Mey (Les Apothicaires, Lyon)
  • L’Hôtesse : Stéphanie Crockford (Racines, Paris 2e)
  • La Sommelière : Marine Delaporte (Yam’Tcha, Paris 1er)
  • Le Proche : Chase Lovecky (Two Lights, Londres)