AccueilLifestyle

Cheval d’Or, ou la naissance d’un resto : épisode 2

Cheval d’Or, ou la naissance d’un resto : épisode 2

Image :

© Sara Bentot pour Club Sandwich

avatar

Par Robin Panfili

Publié le

Épisode 2 : comment écrire un menu à partir de zéro, surtout quand deux chefs sont aux commandes.

Cheval d’Or est le nouveau projet de restaurant imaginé par les chefs Taku Sekine (Dersou) et Florent Ciccoli (Pères Populaires, Café du Coin, Bones, Au Passage…). Dans une série de trois épisodes, Club Sandwich vous raconte la naissance de cette nouvelle aventure et les péripéties qui pimentent l’ouverture d’une cantine asiatique populaire à Paris.

Épisode 1 : Chantier, pas de portes et autres petites péripéties
Épisode 2 : Comment créer un menu à partir de zéro ?
Épisode 3 : Le stress et l’adrénaline de l’ouverture

À voir aussi sur Konbini

***

Au Cheval d’Or, on a longtemps servi les grands classiques de la cuisine chinoise. C’est d’ailleurs cela qui a fait et construit la renommée du lieu aux yeux des gens du quartier, pendant près de trente ans de “bons et loyaux services”. Surpasser, ou tout du moins égaler, cette proximité et légitimité avec les riverains sera probablement l’un des gros challenges de Florent Ciccoli et Taku Sekine à Cheval d’Or.

“Quand les gens ont appris qu’on avait récupéré le bail de cet établissement, des gens m’ont appelé pour me féliciter : ‘Bravo pour Cheval d’Or, bravo d’avoir choisi cet endroit’, se souvient Taku. Forcément, ça met un peu la pression.”

(© Taku Sekine)

S’il a fallu beaucoup travailler à la réfection du restaurant (voir l’épisode 1), le chef de Dersou n’a pas pour autant manqué de réfléchir à ce qui remplirait ses casseroles une fois le restaurant ouvert. Avant de les mettre à la corbeille au vu du retard des travaux, il a ainsi griffonné plusieurs ébauches de menus. “Des idées, des inspirations”, dit-il. Lorsque nous l’avons rencontré, à quelques semaines de l’ouverture, Taku Sekine n’avait aucune idée de sa carte finale et définitive. Pas par manque d’imagination, mais plutôt par envie de spontanéité.

“Je ne suis pas stressé de cuisiner. Dans la cuisine, si c’est la cuisine que tu vas proposer qui te fait stresser quand tu ouvres un restaurant, alors mieux vaut ne pas le faire.”

Carte blanche à Taku

Si la carte est encore en pleine ébauche, Taku Sekine a une idée assez précise de ce qu’il va proposer à la carte. Pour cela, il s’est mis d’accord avec son acolyte, Florent Ciccoli. “On a finalement assez peu discuté de la carte ensemble car les rôles ont été naturellement répartis. J’ai une connaissance limitée de la gastronomie asiatique, alors je lui ai laissé carte blanche sur le menu, le recrutement des équipes…”, explique le chef et tenancier du Café du coin.

Fort de son expérience en matière d’ouverture de resto, il s’est davantage concentré sur le suivi des travaux, le timing de l’ouverture et les rouages administratifs. “On a juste discuté des prix de la carte, comment ajuster les coûts… Au final, moi qui pensais qu’il aurait une approche plus gastronomique que moi, et plus chère, Taku m’a présenté des prix plus bas que ce que j’avais imaginé”, sourit-il.

Dans ce projet, la mayonnaise semble avoir pris entre les deux chefs. Une osmose pas forcément évidente dans le monde de la restauration où les idées et les caractères sont souvent source de conflit.

(© Taku Sekine)

Cuisine spontanée et moins complexée

Les premières pistes du menu de Cheval d’Or iront dans le sens d’une cuisine plus décomplexée, plus simple et plus spontanée que celui de Dersou, l’autre restaurant parisien à succès de Taku Sekine. Plus qu’une direction, c’est une véritable volonté pour le chef (et jeune papa) japonais.

“Je veux une trentaine de trucs à ma carte, avec plus de la moitié en dessous de dix euros, des vins chers et des vins très abordables, énumère-t-il. En fait, je veux un restaurant pour tout le monde. Un endroit où les gens du quartier se sentiront bien – pour un bol de nouilles ou pour un dîner entre amis –, où les enfants seront les bienvenus…”, dit Taku Sekine, qui a lui-même passé beaucoup de temps au restaurant plus petit, quand ses parents rentraient tard du travail.

S’il dit “oublier ce qu’il veut cuisiner” du jour au lendemain, Taku Sekine ne s’alarme pas. Bien au contraire :

“Tu sens le client, tu sens ses envies. Dès que tu as une idée, tu peux la faire cinq minutes plus tard. On construira la carte comme ça, on la changera régulièrement. Si on veut faire des pizzettas un soir, comme au Café du coin, alors on les fera.

Il y aura moins de tension et de contrainte artistique et plus de liberté qu’à Dersou. Cheval d’Or, c’est plus l’idée de venir sur un coup de tête, et une cuisine dans laquelle je pourrai m’exprimer autrement.

Il y aura peut-être des assaisonnements similaires à ceux de Dersou, car ça reste ma cuisine, mais je pourrais parfois proposer des plats plus pimentés que je pourrais jamais servir là-bas.”

(© Taku Sekine)

“Allô, c’est à propos des carottes”

S’il a fallu penser la carte, il a aussi fallu prévenir les producteurs de l’arrivée imminente d’un nouvel établissement. Mais pour ça, Florent Ciccoli et Taku Sekine n’ont pas rencontré beaucoup de difficultés : ils feront appel aux mêmes producteurs que ceux qui fournissent leurs établissements respectifs. “Pourquoi je n’utiliserais pas les produits de Dersou à Cheval d’Or ? Qui a décidé qu’un bistrot ou qu’une cantine devrait être cantonnée à des produits de moindre qualité ?”, demande Taku Sekine.

Au menu : les carottes bretonnes d’Annie Bertin, les œufs et les vins de Fleur Godart, les légumes de la Ferme ô VR, les homards et Saint-Jacques d’Emmanuelle Marie, les viandes de la Ferme de Clavisy… “Et si on n’a pas de pak choi, alors on prendra de superbes brocolis. Tant pis si on n’est pas dans l’Asie authentique, l’idée est de reproduire une sensation de cuisine asiatique.” Grosso modo : des producteurs “pas trop loin, qui font des trucs bien”, résume Florent Ciccoli. Et montrer qu’on peut vraiment faire de très bonnes choses pour pas trop cher.

Dans le prochain épisode, Taku Sekine et Florent Ciccoli nous parleront du stress qui entoure l’ouverture d’une nouvelle adresse, entre pression médiatique, exigence du public et assiettes manquantes. Rendez-vous la semaine prochaine.

Épisode 1 : Chantier, pas de portes et autres petites péripéties
Épisode 2 : Comment créer un menu à partir de zéro ?
Épisode 3 : Le stress et l’adrénaline de l’ouverture