On a déjeuné chez Saturne avec le grand chef catalan Ferran Adrià, pape de la cuisine moléculaire

On a déjeuné chez Saturne avec le grand chef catalan Ferran Adrià, pape de la cuisine moléculaire

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Par Pharrell Arot

Publié le

Le cerveau derrière le mythique restaurant El Bulli arrive le 2 juillet prochain sur Amazon Prime Vidéo dans un documentaire indispensable.

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Il y a des piliers de la cuisine moderne, et il y a Ferran Adrià, le chef qui a permis au monde de découvrir la cuisine moléculaire. Chevelure grise et style sobre – un simple T-shirt noir sur les épaules –, le propriétaire du restaurant qui s’est hissé à la première place du classement 50 Best en 2002, 2006, 2007, 2008 et 2009, avant de le fermer en 2011, venait présenter à Paris ce mardi midi sa série documentaire, El Bulli : l’histoire d’un rêve. Pour parler innovation, création et tout simplement répondre à la question “qu’est-ce que la cuisine ?”, le grand monsieur nous a donné rendez-vous à la table de Sven Chartier et Ewen Le Moigne : Saturne.

De l’impossibilité du naturel

Dans un français à l’accent catalan, Ferran, habitué à professer à Harvard, vient ici pour nous parler de sa série, mais surtout discuter de cuisine en général, et de son travail, dédié depuis la fermeture de son restaurant à replacer sur une “timeline” les acquis d’une cuisine, traditionnelle ou instantanée. Cette connaissance, compilée dans sa Bullipedia, une somme encyclopédique sur la gastronomie en 17 500 pages et 35 volumes, permet de mieux comprendre aujourd’hui transmission et inspiration.

“On s’est juste dit qu’on allait tout écrire. Revenir dans le passé, replacer dans le temps les premiers à réaliser n’importe quel acte culinaire, d’Escoffier à Michel Guérard. On ne dit pas que c’est compliqué, on veut juste replacer quand et comment. Savoir par exemple à quel moment on a compris comment cuire une palourde pour qu’elle ne soit pas un morceau de caoutchouc.”

Pendant ce cours magistral, où clairement tout n’est pas accessible de prime abord, nos hôtes de Saturne, eux, maîtrisent et envoient. La plus belle carte de vins naturels de Paris, une cuisine fine et pensée, voilà de quoi nous faire plonger dans les grands principes théoriques de notre bon Ferran.

Il nous explique par exemple qu’il faut différencier le naturel du chimique (point un gros mot dans sa cuisine), aussi bon l’un que l’autre si on en reste à la définition technique, en prenant l’exemple d’un simple oignon, dont l’essence deviendra un élément chimique de sa cuisine, sans pour autant être synthétique.

Messi, c’est Jésus

Derrière la théorie, il y a les bons mots de Ferran. Comparant l’incomparable, excité comme jamais à quelques heures du match de l’Argentine, le Catalan supporte évidemment le Barça et cite Messi comme son Jésus personnel ; comme si le football était plus important que le lancement de son docu-série, fil rouge d’une carrière où Robuchon l’appelait déjà “le meilleur cuisinier du monde” en 1995.

En 15 épisodes compilant plus de 13 ans de tournage et conviant presque 200 personnes, ce récit d’un rêve permet, à la manière du travail effectué par Ferran depuis la fermeture d’El Bulli, de replacer son travail dans sa chronologie rêvée, de rendre à chaque inspiration son crédit dans la création et, pour le chef, de ne plus jamais entendre : “Alors Ferran, c’est quoi la cuisine moléculaire ?” Niche, oui, mais terriblement passionnante, la série sera disponible en intégralité sur Amazon Prime Video le 2 juillet prochain.

El Bulli : l’histoire d’un rêve
Le 2 juillet sur Amazon Prime Video

Saturne
17 rue Notre-Dame-des-Victoires, 75002 Paris
Réservation : 01 42 60 31 90